Rattraper mon retard avec Gilles Leroy
- Tanguy Piole
- il y a 2 minutes
- 2 min de lecture
L’été, ses journées entières volées au temps pour des lectures de rattrapage : Dormir avec ceux qu’on aime (2012) et L’amant russe (2002) de Gilles Leroy. Beaucoup de choses ont touché mon âme dans ces deux romans autobiographiques (de cet auteur de soixante-six ans je ne connaissais qu’Alabama song, Prix Goncourt 2007, difficile de reconnaitre le jeune homme de 1975 sur ses photos d'aujourd'hui). La narration impudique des sentiments et des caresses des hommes, la rêverie que procurent les migrations aériennes, le front collé au hublot à observer la taïga, une approche de l’existence désenchantée et exaltée à la fois. Aussi, un style recherché, des termes précis, parfois délicieusement surannés. À travers les lapsus révélés par ses fautes de frappe, l’écrivain se devine en plein acte d’écriture. J’ai commencé par Dormir avec ceux qu’on aime. Quel titre magnifique, pugnacité du mode infinitif ! Une vie à coucher dehors, écrivait Sylvain Tesson ; de préférence avec les hommes d’un soir ou d’une frange de vie, semble lui répondre Gilles Leroy. Dans Dormir avec ceux qu’on aime, l’auteur raconte son coup de foudre pour Marian, un rocker roumain désargenté avec lequel la passion est immédiate mais ne survivra pas aux fuseaux horaires et aux années. Marian rappelle à Gilles Leroy Volodia, son héros de L’amant russe. Avec lui, dans un Leningrad au sommet de l’aventure soviétique, Gilles Leroy avait vécu quelques jours qui valaient des années. L’auteur avait seize ans - seize ans presque et demi - et beaucoup d’audace. Dans L’amant russe, la tension érotique se raconte au fil de soirées dans lesquelles même la vodka est policée. Jusqu’à un double orgasme dont je tairai le décorum sordide. Une exultation sans lendemain. Vite, la suite, lire tout Gilles Leroy !
Photo : Gilles Leroy, août 1975, retour d'URSS